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Échéance du bail à construction, restitution des locaux et loi Alur

Civil - Immobilier
04/04/2019
Les contrats de location consentis par le preneur d’un bail à construction s’éteignent à l’expiration du bail… seulement si le bail a été conclu avant le 27 mars 2014 !
Aux termes de l’article L. 251-6 du Code de la construction et de l’habitation, dans sa version antérieure à la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 (JO 26 mars), dite loi Alur, lorsqu’un bail à construction est conclu, « Les (…) privilèges, hypothèques ou autres charges nées du chef du preneur et, notamment, les baux et titres d'occupation de toute nature portant sur les constructions, s'éteignent à l'expiration du bail ».

En l’espèce, des époux ont acquis des parts d’une société civile d’attribution, ayant pour objet l’acquisition d’un terrain, donné à bail à construction pour une durée de vingt-cinq ans à une société HLM, laquelle s’est engagée à faire édifier des logements, les entretenir et les louer pour la durée du bail, expirant le 19 juillet 2010. Les époux ont consenti à leurs trois enfants une donation portant sur la nue-propriété de leurs parts sociales. Ces mêmes enfants, devenus propriétaires de trois appartements, occupés à l’expiration du bail à construction, ont assigné la société HLM en indemnisation.

Les juges du fond ont fait droit à cette demande. Ils ont retenu à l’encontre de la société HLM un manquement à son obligation de restitution, en ce que les appartements devenus la propriété des enfants au sein de l’immeuble objet du bail à construction n’étaient pas tous libres de tout occupant à l’échéance de ce bail à construction, le 19 juillet 2010.

La société HLM reconnaît ce fait mais elle objecte que la présence d’occupants sans droit ni titre dans l’immeuble objet du bail à construction, au jour de son échéance, n’est susceptible d’engager la responsabilité du preneur que s’il est constaté qu’il avait consenti des baux pour une période allant au-delà de cette échéance, sans avoir averti en temps utiles les locataires de ce que ces baux s’éteindraient au jour de cette échéance. En l’espèce, les baux qu’elle avait conclus n’allait pas au-delà de l’échéance et les locataires avaient été prévenus en amont.

Mais la Cour de cassation rejette le pourvoi. Rappelant que les contrats de location consentis par le preneur d’un bail à construction s’éteignent à l’expiration du bail (CCH, art. L. 251-6, ancien), la Cour valide le raisonnement des juges du fond en ce qu’il sont relevé que le contrat de bail à construction mentionnait que le preneur pourrait louer les constructions pour une durée ne pouvant excéder celle du bail, que la société d’HLM, qui, seule, pouvait fixer le terme des baux qu’elle avait consentis sur les appartements, ne disposait de droits sur les immeubles que jusqu’au 19 juillet 2010, date d’expiration du délai contractuel de vingt-cinq ans figurant au contrat de bail à construction du 19 juillet 1985, et que les trois appartements des consorts (…) ne leur avaient été restitués respectivement qu’en novembre 2010 et novembre 2011.
En conséquence, la cour d’appel « en a exactement déduit que la société d’HLM avait manqué à son obligation de restituer les lieux libres de tous occupants ».

Cette solution n’est qu’une exacte application de l’article L. 251-6 précité du Code de la construction et de l’habitation, applicable à l’espèce. La Cour de cassation la publie largement du fait que depuis l’entrée en vigueur de la loi Alur, ce même article a été quelque peu modifié. Désormais, « Les (…) privilèges, hypothèques ou autres charges nées du chef du preneur et, notamment, les baux et titres d'occupation de toute nature portant sur les constructions, s'éteignent à l'expiration du bail sauf pour les contrats de bail de locaux d'habitation ». Dès lors, pour les baux à construction conclus à compter du 27 mars 2014, la solution ici dégagée n’a plus vocation à s’appliquer. Seuls les baux conclus antérieurement restent soumis à l’ancienne règle.
Source : Actualités du droit