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Next40 et FT120 : ambitions et moyens d’action du gouvernement en faveur des start-ups françaises

Tech&droit - Start-up
18/09/2019
Le 18 septembre 2019, la stratégie française destinée à encourager les pépites françaises de la tech a été dévoilée. Le gouvernement entend lever les freins à la croissance des start-ups françaises. Tour d’horizon des annonces.
À l’occasion d’un dîner organisé par le think tank France Digitale, Emmanuel Macron a dévoilé le 17 septembre 2019, les grands axes de cette stratégie. Le lendemain, le détail de ces mesures a été rendu public par le ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire.
 
Un chiffre est à retenir : 25. C’est le nombre de licornes qu’espère compter la France d’ici 2025 (la French tech en compte 7, actuellement). Pour y parvenir, une étape importante vient d’être franchie avec la révélation de deux nouveaux indicateurs, qui visent à identifier et mieux accompagner les pépites françaises de la tech qui pourraient précisément devenir des licornes :
  • le Next40 ;
  • le FrenchTech120 (FT120).
Le Next40 est une sélection de start-ups françaises à très fort potentiel, ayant pour ambition de devenir rapidement des leaders technologiques de rang mondial.
 
Quels sont les critères ? :
  • avoir son siège social installé en France
  • ne pas avoir encore fait de sortie (rachat ou introduction en bourse)
  • viennent ensuite des critères économiques :
    • à savoir avoir réalisé les levées de fonds les plus importantes sur les trois dernières années,
    • afficher un chiffre d’affaires supérieur à cinq millions d’euros pour le dernier exercice,
    • avec une croissance annuelle moyenne d’au moins 30 % sur les trois derniers exercices.
Sachant que sont automatiquement intégrées au Next40, les 7 licornes (sociétés technologiques valorisées plus d’un milliard de dollars) et les start-ups qui ont levé plus de 100 millions d’euros sur les trois dernières années.
 
Le FT120 sera composé de ces 40 start-ups du NEXT40, dont les noms ont été révélés le 18 septembre (pour le détail des lauréats, v. ICI), et de 80 autres (ces lauréats seront connus à partir de janvier 2020). A l’heure actuelle, pas vraiment de critères précis pour le programme FT120, autres que « les données financières et commerciales ».
 
L’écosystème Tech français en quelques chiffres
– 10 000 start-ups ;
– 7 licornes ;
– 30 start-ups ayant levé plus de 50 millions ces 3 dernières années ;
– 25 000 emplois directs créés dans les 12 prochains mois.
source : Direction générale des entreprises (DGE) et Crunchbase
 
Si l’on se focalise plus précisément sur les quarante start-ups sélectionnées dans le cadre du Next40, les chiffres sont éloquents :
  • croissance du nombre d’employés dans les 12 prochains mois : + 30%
  • croissance médiane du chiffre d’affaires sur les 3 dernières années : 158 %
  • création nette d’emplois directs prévue dans les 12 prochains mois : 7 000
  • nombre de start-ups avec au moins un investisseur étranger au capital : 32 (80 %)
« C'est un enjeu en termes de souveraineté, française et européenne, pour rester maître de notre destin et assurer notre prospérité. Il en va aussi de la préservation de notre modèle social dans un monde où les leaders fixent la norme » a souligné Bruno Le Maire. Avec comme sous-jacent, la volonté à la fois d’éviter que le contrôle de certaines pépites soit cédé à des investisseurs étrangers et celle de se maintenir sur une scène internationale sur laquelle les géants de la tech deviennent tout puissants.
 
Trois principaux freins ont été identifiés : le financement, l’environnement réglementaire et administratif et le recrutement.
 
Premier levier : faciliter le financement late stage
En juillet dernier, le rapport Tibi (v. Financement des start-ups françaises : failles de l'écosystème et pistes de solution, Actualités du droit, 22 juill. 2019) avait identifié deux obstacles au développement des start-ups françaises : les levées de fonds late stage (supérieures à 50 millions d’euros) et la cotation boursière.
 
Les annonces faites le 18 septembre ont vocation à répondre principalement à la première et ce, de de deux manières :
  • la mobilisation de fonds auprès des investisseurs institutionnels français : 5 milliards d’euros seront alloués par les principaux investisseurs institutionnels français au financement des entreprises innovantes sur les 3 prochaines années (2 milliards d’euros dans des fonds de capital-risque spécialisés sur le segment du late stage et 3 milliards d’euros pour des fonds gérés par des gestionnaires d’actifs spécialisés sur l’investissement dans les valeurs technologiques cotées)
  • un « scale-up tour » : le président de la République convie chaque année les meilleurs investisseurs étrangers dans la technologie pour une visite d’étude, afin de les convaincre d’investir davantage en France (la 2e édition a eu lieu du 17 au 18 septembre dernier, avec une vingtaine des meilleurs fonds de capital-risque mondiaux et une vingtaine d’investisseurs institutionnels).
Par souci d’efficacité, une gouvernance sera mise en place pour coordonner l’application des engagements annoncés et assurer le suivi des investissements réalisés.
 
Deuxième levier : créer un environnement réglementaire et législatif favorable
Petite révolution demandée à l’administration : elle est incitée à se mettre au service des start-ups. L’objectif : proposer du sur-mesure pour favoriser la croissance de ces 120 start-ups prometteuses.
 
Concrètement, en quoi cela va-t-il consister ? Ces 120 start-ups bénéficieront d’ :
  • un accompagnement personnalisé (mise à disposition d’une équipe dédiée de start-up managers de la mission French Tech, au sein de la Direction générale des entreprises et des référents dans les administrations) : en pratique, ces sociétés pourront par exemple, se voir délivrer une  étude des pays cibles et des outils pour aider la prise de décision de l’entreprise ou encore un coaching spécifique sur tous les sujets administratifs internationaux (douanes, imposition, etc.) et accéder aux outils financiers de prospection de marchés ;
  • une offre de services spécifique conçue pour les start-ups en hyper-croissance et proposée par les administrations et services publics partenaires avec, point important, une offre unique pour faciliter l’accès aux acheteurs publics (Ugap, Direction des achats de l’État, etc.) ;
  • une visibilité renforcée (influence, communication et présence dans les délégations officielles à l’étranger).
Parmi les services proposés, également, une aide à l’introduction en bourse avec Euronext et la préparation de dossiers de candidature à des financements européens.
 
Côté législation, rappelons qu’en 2018 Mounir Mahjoubi, alors secrétaire d’État au numérique, avait déjà annoncé 100 mesures en faveur des start-ups (v. Mounir Mahjoubi annonce cent mesures pour les start-up, Le Figaro, 24 mai 2018). Bruno Le Maire a indiqué qu’au 1er septembre 2019, 50 % de ces mesures sont déjà appliquées (et les décrets d’application de la  loi n° 2019-486 du 22 mai 2019, dite loi PACTE, notamment, ceux sur les seuils d’effectifs et les franchissements d’un seuil devrait faire progresser ce chiffre).

Rappelons, par ailleurs que, approche sandbox friendly oblige, les start-ups peuvent à tout moment solliciter une dérogation réglementaire ou législative au travers du dispositif France Expérimentation.
 
Mais en dehors des mesures déjà connues, aucune autre annonce côté régulation.
 
Troisième et dernier levier : encourager le recrutement de talents
Le recrutement des talents dans le domaine du numérique est loin d’être simple, d’autant que la concurrence est mondiale. Pourtant, près de 80 000 postes ne sont pas pourvus dans le secteur du numérique. C’est la raison pour laquelle l’obtention de visa pour les salariés souhaitant rejoindre des start-ups (French Tech Visa) a été facilitée.
 
Autres points d’action :
  • une page web reprenant les 7 000 offres d’emplois des cent vingt entreprises sélectionnées, qui sera diffusée aux niveaux international et national ;
  • la promotion de la diversité à travers le programme French Tech Tremplin ;
  • atteindre 30 % de femmes dans les fonctions de management, d’ici 2022 (objectif ambitieux si l’on considère qu’actuellement, ce chiffre est de 15 %) ;
  •  le renforcement des liens entre le monde de la recherche et l'écosystème de start-ups (inscrit dans la loi PACTE).
Pour Bruno Le Maire, « le Gouvernement s’est engagé dans un programme d’actions fort et ambitieux pour faire de l’écosystème start-up français le numéro 1 en Europe ».
Source : Actualités du droit