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Vendôme Tech 3 : des avancées concrètes et la volonté de s’appuyer sur les professionnels du droit

Tech&droit - Start-up
22/01/2020
Les grands projets de transformation numérique de la justice progressent, à leur rythme, mais avec une ferme volonté de les voir mener rapidement à leur terme. Certains sont en cours d’expérimentation, d’autres encore en développement. La 3e édition de la Vendome Tech, organisée le 20 janvier 2020, a été l’occasion de faire le point sur leur déploiement et de découvrir de nouveaux projets.
C’est déjà la 3e édition de cet événement dédié à la transformation numérique de la justice. Et cette année, le fil directeur était différent des précédentes années. Au cœur de cette V3 : la collaboration entre directions, ministères, acteurs publics et privés et avec les acteurs de la justice. D’où la présence de représentants du Conseil supérieur du notariat ou de l’accélérateur Syllex, côté huissier. En revanche, pour cause de tensions sur la réforme des retraites, notamment, pas d’avocats cette année.
 
Côté nouveauté, cette année, un village de l’innovation avec vingt acteurs, aussi bien des projets estampillés Chancellerie (Pilot, numérique en détention, TIG 360°, Système d’information de l’aide juridictionnelle (SIAJ), Justice.fr, Numérique en détention, etc.), que des legaltechs. « Notre rendez-vous annuel, a indiqué la ministre de la Justice, est une occasion donnée à l’écosystème élargi de la transformation numérique de la justice (y compris les entrepreneurs du secteur, les legaltechs) de faire connaissance, de se retrouver, d’échanger, de partager ses expériences, de nouer des relations qui peuvent déboucher sur des projets communs et de travailler ensemble sur quelques-uns des nombreux sujets précis que suscite cette transformation ».
 
 
Trois points d’action et des avancées concrètes
Pour avancer, la Chancellerie doit agir simultanément sur trois axes à la fois :
  • les infrastructures techniques ;
  • les applicatifs ;
  • l’accompagnement.
 
« Le plan de transformation numérique comporte un effort conséquent de mise à niveau de nos infrastructures techniques » a précisé la ministre. Visioconférence, déploiement du VPN (qui permet à de nombreux agents de télétravailler) et du WIFI sécurisé justice, etc. 
 
L’objectif : la mise à disposition de meilleurs services aux usagers de la justice. « C’est cet axe applicatif du plan de transformation numérique qui est pour nous le plus ambitieux » a rappelé la garde des Sceaux.
 
 
Quelques chiffres
– plus de 80 % des mises à disposition d’extrait vierge de casier judiciaire désormais dématérialisées ;
–  la visioconférence permet d’éviter 1 724 déplacements de détenus chaque mois, en moyenne ;
– 100 % de la transmission des pièces aux avocats dans le cadre des affaires civiles est désormais dématérialisée.
 
Un certain nombre de démonstrations ont permis de découvrir quelques-uns de ces applicatifs, en l’espèce la plateforme numérique TIG 360° pour la mise en ligne, la prospection et le suivi de mesures de travaux d’intérêt général (ouverture successive de services destinés aux différents acteurs au cours de l’année 2020), le système d'Information de l'aide Juridictionnelle ou SIAJ (qui pourrait aboutir fin 2020) et la procédure pénale numérique.
 
Être l’équivalent d’impot.gouv.fr pour les usagers de la justice, tel est l’objectif du portail Justice.fr. Mais que permet-il actuellement ? De suivre en ligne les affaires, d’être informé des différentes échéances des affaires et la dématérialisation de la transmission des pièces aux avocats dans le cadre des affaires civiles. « Courant 2020, a précisé la garde des Sceaux, le site justice.fr permettra la saisine en ligne dans le cadre d’une constitution de partie civile ainsi que dans le domaine de la gestion des mesures de protection des majeurs et la consultation en ligne des affaires pénales ». D’autres expérimentations de services sur le numérique en détention seront lancés en 2020.
 
Autres projets déployés, la procédure pénale numérique, encore en mode expérimentation. Concrètement, une première audience numérique a été organisée et un 1er mandat de dépôt numérique déposé, avec la signature numérique des magistrats. Ou encore COMEDEC , une plateforme visant à simplifier la vie des usagers qui permet aux préfectures, notaires et communes d’échanger de façon dématérialisée, des données d’état civil. Autant de démarches administratives en moins pour les usagers (élaboration de titres sécurisés, actes notariés, dossiers de mariages ou de pacs). Rien qu’en 2019, « COMEDEC a poursuivi sa progression et capitalisé près de 10 millions d’échanges » a tenu à souligner Nicole Belloubet.
 
Étant précisé qu’un portail regroupera tous ces services et les informations sur le sujet, pour accompagner au mieux les utilisateurs.
 
 
Un leitmotiv affiché, commun à tous les projets de transformations numériques des ministères : l’inclusion
C’est à la fois un point de vigilance et un objectif : « Si j’ai placé le plan de transformation numérique comme 1re priorité, c’est à la fois parce que, de son succès, dépend celui des autres chantiers de la justice mais également parce qu’il est porteur de réponses aux attentes de services publics et d’inclusion » a indiqué la garde des Sceaux, pour qui « la saisine en ligne, le suivi des procédures, l’aide juridictionnelle « en un clic » sont des projets qui abaissent les barrières socio-culturelles ou économiques d’accès à la justice ».
 
Ce déploiement de services numériques n’est pas exclusif d’un accompagnement humain. Un maintien des voies traditionnelles d’accès à la justice, qui passe par deux ancrages est prévu :
  • un service physique d’accès unique du justiciable (le SAUJ) ;
  • une présence au sein des maisons France service, bientôt présentes sur l’ensemble du territoire.
Cette volonté d’inclusion est par exemple au cœur du suivi des jeunes qui s’inscrivent dans un parcours au titre de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ). La ministre de la Justice a ainsi présenté le projet PARCOURS, « de rénovation du système d’information doit permettre une mobilisation et un échange de l’ensemble des informations concernant les mineurs entre les acteurs impliqués. Sa mise en place qui suivra celle de la loi sur la justice des mineurs en servira les nouvelles ambitions ». Une plateforme qui organisera les échanges afin « de coller à la complexité de la réalité d’un mineur désormais placé au centre du système ».

 
Le moment open data
C’est un peu l’arlésienne depuis trois ans et demi : le décret open data :
– La ministre a précisé que « Nous finalisons le décret d’application de la loi de programmation pour la justice relatif à la mise à disposition en ligne des données contenues dans les décisions de justice. La transparence et l’abondante source d’information qui en découleront doivent s’accompagner de précautions. L’occultation des noms et prénoms des personnes mentionnées dans la décision en est la principale mais pas la seule. Le chantier n’est pas simple ».
– avec une échéance un peu vague : « dans les prochaines semaines »...
 

Une méthode : le travail en mode collaboratif avec les professionnels du droit
La tonalité était claire et la volonté explicite : tous ces projets de transformations s’appuient nécessairement sur les professionnels du droit, qualifiés de « partenaires ». « Pour mener la transformation numérique, le ministère de la Justice a besoin de partenaires du domaine du numérique (…) mais aussi et plus encore, de la justice » a insisté à plusieurs reprises la ministre. Avec deux exemples : la juridiction unique des injonctions de payer « qui ne peut se mettre en place sans les huissiers et leur coopération nous est précieuse comme l’est celle des notaires dans la mise en place de COMEDEC ».

Si la volonté est là, également, côté avocat, c’est dans les faits un peu plus difficile. Nicole Belloubet a certes souligné que la collaboration avec « nos partenaires avocats est indispensable dans de nombreux chantiers et nous la souhaitons vivement pour nos dossiers à venir comme elle a été possible sur le dossier de la communication électronique ». Mais en pratique, des tensions paralysent pour l’heure les échanges sur ce dossier. Avec une échéance importante en ligne de mire, puisque la ministre a rappelé que « Nous ne pourrons pas mettre en place la procédure civile si nos systèmes d’informations ne se connectent pas pour permettre la prise de date dès septembre prochain ». Ce qui ne laisse que sept mois…
Source : Actualités du droit