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Ordonnance de protection : à quelles conditions ?

Civil - Personnes et famille/patrimoine
28/02/2020
Deux conditions cumulatives sont nécessaires pour la  délivrance d’une ordonnance de protection : le JAF doit constater qu'il existe des raisons sérieuses de considérer comme vraisemblables tant la commission des faits de violence allégués que le danger auquel la victime ou un ou plusieurs enfants sont exposés.
Un juge aux affaires familiales (JAF) a, le 23 janvier 2019, délivré à une femme une ordonnance de protection aux termes de laquelle il a fait interdiction au conjoint d'entrer en relation avec elle et de porter une arme. Le JAF décide également que l'autorité parentale sur leurs deux enfants communs sera exercée conjointement par les parents. Il fixe provisoirement leur résidence habituelle au domicile de la mère et l’autorise à dissimuler ce dernier. Enfin, il accorde un droit de visite au père qu’il exercera dans un cadre médiatisé.

En appel, les juges rejettent la demande d'ordonnance de protection. La mère se pourvoit en cassation, reprochant aux juges d’appel de n'a pas avoir tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de leurs propres constatations et d’avoir ainsi violé les articles 515-9 et 515-11 du Code civil.

La Cour de cassation rejette son pourvoi. Elle commence par rappeler les termes de l’article 515-9 du Code civil (« lorsque les violences exercées au sein du couple mettent en danger la personne qui en est victime, un ou plusieurs enfants, le juge aux affaires familiales peut délivrer en urgence à cette dernière une ordonnance de protection »). Puis, la Haute juridiction indique que « selon l'article 515-11 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2019-1480 du 28 décembre 2019, l'ordonnance de protection est délivrée, dans les meilleurs délais, par le juge aux affaires familiales, s'il estime, au vu des éléments produits devant lui et contradictoirement débattus, qu'il existe des raisons sérieuses de considérer comme vraisemblables la commission des faits de violence allégués et le danger auquel la victime ou un ou plusieurs enfants sont exposés ». Ensuite, et c’est l'apport de cet arrêt, la Cour juge que ces deux conditions sont cumulatives.

Partant, « après avoir constaté que les relations du couple sont manifestement difficiles depuis plusieurs années et empreintes de violences verbales imputables tant à l'un qu'à l'autre des conjoints, l'arrêt relève que si des violences physiques invoquées par (la mère) dans la nuit du 13 au 14 novembre 2018 sont vraisemblables, la crainte décrite par celle-ci que (le père) s'en prenne physiquement à elle et aux enfants, ce qui l'a conduite à quitter le domicile conjugal, apparaît quelque peu excessive, dès lors qu'elle n'a jamais soutenu que d'autres scènes de violences physiques aient pu avoir lieu et n'a pas plus rapporté la preuve d'éléments permettant d'établir que des menaces de mort ont été proférées par (le père) à son encontre. Il ajoute que depuis la décision déférée, ce dernier a pu rencontrer ses enfants à son domicile et qu'aucun élément médical ne permet de soutenir que ceux-ci éprouvent de la crainte à rencontrer leur père. En l'état de ces constatations et appréciations, c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain que la cour d'appel, qui était tenue de se placer à la date où elle statuait, a, sans inverser la charge de la preuve, estimé que (la mère) ne démontrait pas l'existence d'un danger actuel pour elle ou pour ses enfants, de sorte que la délivrance d'une ordonnance de protection n'était pas justifiée ».
Source : Actualités du droit