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Rétrocession par la SAFER : importance de la motivation

Civil - Immobilier
03/03/2020
La motivation d’une décision de rétrocession de la SAFER doit comporter des données concrètes permettant au candidat non retenu de vérifier la réalité des objectifs poursuivis au regard des exigences légales.
Comme vient de le rappeler la Cour de cassation, la SAFER offrant la revente d’un fonds acquis par elle doit motiver et publier sa décision de rétrocession.

En l’espèce, une SAFER, bénéficiaire d’une promesse de vente de plusieurs terrains, a procédé à un appel à candidatures en vue de leur rétrocession. Le 24 mai 2013, la vente des parcelles a été réalisée au profit du candidat retenu et le même jour, ces mêmes parcelles ont été échangées avec un autre candidat qui n’avait pas été retenu au départ. Le 15 juillet 2013, la décision de rétrocession a été notifiée aux autres candidats non retenus. L’un des candidats évincés a alors saisi le tribunal en annulation de cette décision et des actes subséquents.

Selon ce dernier, le motif notifié était fallacieux dans la mesure où les parcelles ont été échangées le jour même avec un autre agriculteur. La rétrocession n’avait donc eu pour objectif que de satisfaire des intérêts particuliers et non l’un de ceux visés aux articles L. 143-1 et suivants du Code rural et de la pêche maritime.

Les juges du fond ont rejeté cette argumentation. Le motif allégué par la SAFER était le suivant : « Agrandissement d’une exploitation agricole spécialisée en production laitière, disposant de parcelles à proximité et devant subir des emprises foncières liées au développement urbain du secteur. Cette rétrocession permettra également un échange parcellaire avec un autre exploitant agricole du secteur, ce qui mettra fin à des problèmes d’accès ».
Les juges retiennent que cette motivation suffit à informer la société destinataire de la notification, dès lors que l’opération a permis à l’agriculteur bénéficiaire de l’échange d’acquérir les parcelles rétrocédées, difficiles d’accès pour celui-ci et à proximité de son exploitation, tandis que le candidat retenu a acquis les parcelles vendues, ce qui a résolu la difficulté d’accès à l’ensemble des terres composant leur exploitation.

La Cour de cassation censure cette décision au visa de l’article L. 143-3 du Code rural et de la pêche maritime. Elle estime « qu’en statuant ainsi, alors que la motivation de la décision de rétrocession, qui doit se suffire à elle-même, doit comporter des données concrètes permettant au candidat non retenu de vérifier la réalité des objectifs poursuivis au regard des exigences légales, la cour d’appel a violé le texte susvisé ».

Cet arrêt s’inscrit dans une jurisprudence déjà bien établie (v. notamment, Cass. 3e civ., 18 févr. 2009, no 08-10.575, Bull. civ. III, no 46 ; Cass. 3e civ., 12 mai 2015, no 14-11.231 ; Cass. 3e civ., 18 janv. 2018, no 16-20.937, publié au Bulletin).
Source : Actualités du droit